Wizards of the Coast a apparemment subi une coupe budgétaire, puisque toutes les histoires de Kaldheim n'ont pas été traduites en français. Comme cela fait un certain temps que celle-ci est publiée sur le site anglais, je me suis dit que je ne perdrais rien à vous la traduire.
Dans les temps anciens de Kaldheim, Lathril, une elfe, devint une déesse. En voici le premier haut fait. Vous trouverez l'article original ici.
La Saga de Lathril
Lathril se tenait à l'embouchure de la grotte, son sang pulsant dans ses veines avec la magie dont on lui avait fait la grâce pendant son épreuve. Pliant ses doigts, elle pouvait sentir comment la transformation s'installait, chaque muscle et chaque os, chaque tendon de son corps changeant alors qu'elle devenait plus qu'une mortelle. Elle endossait le manteau de la divinité.
La décision avait été simple en quelque sorte. Les siens avaient besoin de protection, de soutien, d'une plus forte connexion avec le divin. Il y avait eu une guerre il y a peu, et bien qu'ils eussent vaincu, c'était à peu de chose. Lathril n'avait jamais voulu voir sa communauté perdre tant à nouveau, alors elle avait trouvé un moyen de protéger les siens. Elle le devait. Elle avait demandé à un dieu de les accepter, de les garder, et elle fit les sacrifices nécessaires pour cela.
Elle ouvrit ses yeux pour admirer les visages de la foule dont elles savaient qu'ils attendaient de la guider de retour au village pour la célébrer. Quelque chose était différent. Quelque par rapport à ce qu'elle pouvait voir. Elle savait déjà qu'elle changerait, que quelque chose à propos d'elle ne serait plus comme avant. Les histoires étaient claires : devenir un dieu, c'est perdre une part de soi-même. Elle avait accepté ce prix, sans savoir quel il serait.
Plutôt que de voir le monde comme elle l'avait toujours vu, sa concentration s'était réduite. Elle pouvait voir le visage de sa fille dans la foule, brouillé par la distance, la distinguant par les vêtements qu'elle portait. Elle pouvait voir les arbres, mais plutôt que des feuilles individuelles qu'on eût pu distinguer l'une de l'autre, elle voyait un flou vert, éclairé par le soleil doré. Elle était tant désorientée par ce monde si petit, surtout depuis qu'elle savait qu'il était bien plus grand que ce qu'elle avait vu jusqu'à présent. Tournant la tête, elle pouvait voir plus de visages, plus de corps, plus de flou. Le monde était devenu si petit.
Mais elle était toujours une déesse.
Elle se réveilla au milieu de la nuit à cause d'un museau proche de son visage. Son premier réflexe fut de saisir l'épée à son côté dans le lit, mais la voie était bloquée... par de la fourrure. Elle n'avait pas l'habitude pour l'instant de tourner sa tête pour regarder des choses, mais une fois qu'elle l'eut fait, elle se trouva face à face avec une paire d'yeux turquoise, placés sur la tête d'un magnifique loup de cuivre. Dans la terne lumière de la bougie, Lathril pouvait voir la fourrure tricolore pour laquelle les loups de cuivre étaient si connus – une couche de fourrure blanche avec une sous-couche d'or et d'argent et, bien sûr, de cuivre. Sa fourrure brillerait au soleil ou à la lune comme un phare. Le loup s'installa à côté d'elle, mit ses pattes sur sa tête, et s'endormit.
Lathril regarda aussi longtemps qu'elle le put, mais s'endormit finalement. Après tout, le loup ne lui faisait rien – elle n'avait étrangement aucune peur du loup qui la malmenait dans son sommeil.
Elle n'avait pas su qui la choisirait, seulement que si elle suppliait elle pourrait être acceptée. Il n'y avait qu'un seul être divin qui envoyait des louveteaux à ses élus, et c'était Sarulf. Ce devait être un de ses loups. C'était la meilleure explication qu'elle pouvait trouver. Elle s'endormit.
Quand elle se leva le lendemain matin et sortit de son lit peu épais, le loup arqua son dos sous la paume gauche de Lathril et fit les cent pas autour d'elle tandis qu'elle sortait de sa chambre pour gagner le solarium situé au centre de sa maison. Elle avait fait des ajustements depuis l'Épreuve, des signaux tactiles sur le mur pour lorsqu'elle se trouvait incapable de voir dans le noir, des empreintes de pas pour qu'elle pût s'orienter quand elle ne pouvait trouver son chemin (sans vision périphérique, et avec la perte de quelque distance, elle s'ajustait encore à sa nouvelle réalité, même dans sa propre maison.)
Le loup leva la tête et mordilla doucement sa manche, déchirant un peu le doux tissu de sa chemise.
« Ne mange pas mes habits, loup, » grogna-t-elle, mais elle suivit la direction vers laquelle le loup la tirait. Quoiqu'il en fût, ce serait quelque chose d'intéressant que de voir où le loup la voulait emmener dans sa propre maison. Mais le loup la mena vers la grande porte verte qui menait dehors, vers le village. Lathril prit un moment à ajuster sa perception à ce qui était suspendu sur la poignée de porte rutilante – un harnais. En cuir, lisse et poli, avec des éclats métalliques. Le loup le fit glisser sur sa tête, puis lui présenta l'autre bout, le mouvement indiquant qu'elle remuait. « Elle », sans doute, au vu de son énergie.
Le cuir était lisse et souple, parfaitement agréable dans sa main, comme la fusée d'une épée qui avait été créée pour son porteur. La louve tapa à la porte, sans gratter, mais indiquant poliment qu'ils devaient sortir. Lathril était une aventurière de si longue date qu'elle eut la présence d'esprit de saisir son épée à côté de la porte et de la ranger dans le fourreau à sa hanche. C'était un des talents qu'elle n'avait pas perdus, au moins. Elle n'avait pas besoin d'yeux pour cela. Elle donna un coup de pied botté de vert dans la porte pour l'ouvrir doucement et suivit la louve dans la lumière du soleil.
Quand elle passa l'embrasure de la porte, ses yeux réagirent instantanément, la douleur éclatant. Elle les ferma et se tint debout, silencieuse, espérant que la sensibilité à la lumière diminuerait rapidement. Le harnais dans sa main gauche fut tiré en avant, d'une traction qui n'était pas forte mais lui disait de faire un pas, puis un autre. Même avec ses yeux fermées, elle suivait la louve avec le harnais le long du chemin. Intéressant.
Elle avait entendu dire que les loups prenaient parfois des compagnons, choisissant souvent d'aider ceux qui ne pouvaient voir ou entendre, ou dont les esprits avaient capturé leurs traumatismes comme des souvenirs capturés dans l'ambre par des sorcières. Mais Lathril ne s'était pas attendue à gagner son propre compagnon. Le harnais prit un virage serré vers la gauche et elle suivit, le déplacement de ses hanches sans doute presque imperceptible, si quiconque regardait. Des décennies de combats à l'épée l'avaient rendue agile sur ses pieds, et ce n'était qu'une autre forme de la même agilité, apparemment.
Ses yeux s'étaient enfin ajustés, alors elle les ouvrit. Elle se trouva surprise. Elles n'étaient pas là où elle pensait qu'elles étaient. Plutôt que de se rendre vers le village, elles étaient sur un chemin qui se dirigeait vers la forêt. Des roches couvertes de mousse s'alignaient en un chemin presque invisible qu'elles suivaient à travers les arbres verts et jaunes et les haies basses qui faisaient du monde un flou vert.
Devant, il y avait une silhouette. Lathril ne pouvait pas la distinguer, elle était trop loin, mais elle pouvait dire que c'était une silhouette solitaire, debout, silencieuse, à quelque distance, et qu'elles se dirigeaient droit vers elle.
Tandis qu'elles approchaient, les couleurs des vêtements de la silhouette devinrent identifiables. Des bleus profonds et sables bruns constituaient les vêtements de l'autre, et Lathril savait, sans avoir à demander, qui la louve l'avait emmené voir.
« Lathril ! Tu as été invoquée. Bien. Toi et ta louve avez – quand est arrivée cette louve, d'ailleurs ? » demanda Yadira, chef de son clan elfique. « Quoiqu'il en soit, tu as été invoquée pour régler un problème. Je n'ai aucune idée de quoi il peut s'agir, mais il y a une porte que ta louve peut trouver. Quelque chose à propos du fait de traverser les mondes. Elle saura où t'emmener. Dis-lui seulement de t'emmener là où on a le plus besoin de toi. »
Lathril considéra cela. Où on avait le plus besoin d'elle. Elle savait qu'il y aurait des attentes et des besoins à satisfaire. Elle ne s'attendait pas à le faire presque aveugle et avec une louve à son côté, mais sa vie n'avait jamais été prévisible.
« Très bien, louve. Tu vas avoir besoin d'un nom. Mène-moi où on a le plus besoin de moi. » La louve marcha en avant, tirant fort le harnais, et Lathril la suivit tandis qu'une percée de présage s'ouvrait devant elles, et elles marchèrent à travers elle sans pause ni question.
Marcher à travers la percée de présage était comme de marcher à travers une cascade de lumière. Cela consumait tout comme le fait une cascade – le corps tout entier faisant l'expérience d'une sensation de marcher à travers l'eau – mais ce n'était pas de l'eau. C'était de l'énergie.
Quand Lathril sortit de l'autre côté, ses vêtements étaient trempés, ses cheveux dressés, et la louve grogna. Après avoir entendu le grognement, cependant, il y eut un son bien plus important à entendre.
Un cri.
La main droite de Lathril descendit à l'épée à sa hanche, et elle dégaina, l'épée dessinant un arc élégant au-dessus de la tête de la louve. La louve ne réagit pas tant qu'elle ne fut pas prête, puis elles chargèrent en avant, courant ensemble à travers les branches les fouettant et les arbres jusqu'à atteindre une clairière. Un flou au centre d'autres flous était en train de repousser quelque chose. Plusieurs quelques choses, vit-elle, quand Lathril et la louve se furent rapprochées.
Elle avait l'air d'une jeune humaine, de 11 ou 12 ans. Avoir l'air humain et l'être étaient deux choses différentes – qui savait qui habitait dans ce royaume inhabituel ? Mais cela n'avait pas vraiment d'importance. Il y avait ici quelqu'un qui avait besoin d'aide. Lathril lâcha le harnais de la louve et se lança.
« Va derrière la louve, enfant ! » cria-t-elle à la fille évidemment terrifiée tandis qu'elle se lançait dans la mêlée.
Son escrime aveugle fonctionnait mieux tant qu'elle pouvait évaluer leurs lames, alors elle se déplaça rapidement pour évaluer la situation. De près, les quelques choses étaient définitivement des draugar et leurs lames étaient d'un bleu profond et aussi aiguisés que tout ce qu'elle avait pu voir de près. Mais ses talents étaient perfectionnés à un degré de maîtrise que peu pouvaient atteindre. Avec un coup d'épée sur la sienne, elle le rejoignit.
Elle aurait pu se battre les yeux fermés. La tension entre les lames était tout pour elle, la manière dont son épée pressait la sienne, la manière dont elle glissait dans une nouvelle position pour parer. Un grognement à sa droite l'avertit que quelqu'un venait, et elle dégaina la dague hors de son second fourreau avec sa main gauche, l'enfonçant dans la cible invisible en continuant à rendre les coups de son autre adversaire avec la droite.
Quand leurs épées se rencontrèrent ensuite, elle se baissa et effectua le type de désarmement qui rend difficile l'éventualité de reprendre une épée pendant quelques mois, et avec un agile coup de pied dans la tête, l'autre cible était hors d'état de nuire. Quand elle se retourna, le souffle lourd de la bataille, le visuel qu'elle localisa était de ceux qui serraient son cœur.
Sa louve, étincelant dans le clair de lune de ce nouveau monde, entourait la jeune fille qui sanglotait dans sa fourrure.
En quelques rapides pas, elle atteignit la louve et la fille, puis s'agenouilla.
« Est-ce que je peux t'aider ? »
La fille prit une profonde inspiration pour retrouver ses esprits, puis regarda attentivement les épaules de la louve. Ses yeux étaient turquoise, sans pupille, tirant vers la blanc.
« Ils ont pris mon looouuup ! » hurla la fille, serrant plus fort le nouveau qu'elle avait décidé maintenant de faire sien.
Cet enfant n'était pas n'importe quel enfant aveugle perdu dans les bois, et si Lathril savait quelque chose du monde auquel elle appartenait, le loup qu'ils avaient volé n'était pas un loup lambda.
Sarufl avait des enfants. Des louveteaux. Et souvent ils protégeaient des magiciens doués. Cet enfant avait des aptitudes, mais ils devaient être protégés d'un monde qui pourrait les blesser jusqu'à ce qu'elle parvienne à un âge qui lui permette d'avoir son propre pouvoir. C'est pour cela qu'il y avait un loup. Qui que ces hommes soient, ils voulaient faire du mal à la fille.
« Tu vas rester avec nous jusqu'à ce qu'on t'ait emmenée en lieu sûr, dit Lathril en regardant la louve qui grognait doucement en direction de l'attaquant inconscient. Oui, ma louve – je vais m'occuper de ça d'abord. »
Elle fit craquer la neige sous ses pieds jusqu'à ce qu'elle eut atteint les deux ennemis abattus, fouillant soigneusement dans leur équipement afin de trouver corde ou autres options, leur liant finalement les mains et pieds en ayant recours à des ceintures et lacets. Cela ne tiendrait pas éternellement, mais la marque de coup de poignard et la concussion devrait les tenir pendant un bon bout de temps
Quand elle se retourna, l'enfant avait mis sa main sur la sangle qui s'arquait sur le dos du loup, laissant le harnais pour que Lathril puisse le tenir tandis qu'elles marcheraient ensemble.
C'était un monde étrange que celui où elles étaient venues. La neige recouvrait le sol de cristaux bleus, blancs et violets, mais savoir s'ils reflétaient la lumière de Starnheim, ou si c'était simplement la couleur du sol, c'était au-delà de la connaissance de Lathril. Les arbres étaient hauts et fins, leurs branches comme des bras de danseurs ou de combattants, selon l'interprétation. Elles s'étendaient et saisissaient, vrilles tentant de les empêcher d'aller au-delà du sol de la forêt. Lathril garda son ouïe en alerte, mais il y avait peu à entendre au-delà du bruit de huit pieds sur la neige.
« Que peux-tu me dire sur cet endroit ? Et quel est ton nom ? demanda Lathril.
- Lyana, balbutia la fille en reniflant, et mon loup s'appelle Pistache.
- Tu lui as donné un nom de chaton, n'est-ce pas ? » dit la voix traînante de Lathril, tentant de ne pas rire. Sa fille l'avait fait elle aussi.
La fille gloussa.
Derrière le gloussement, il y eut un bruissement, puis un léger gémissement de la louve.
« Attention, » murmura Lathril, s'arrêtant et dégainant à nouveau sa lame. Elle fit faire un cercle complet à sa tête, son corps guidant lentement son regard tandis qu'elle surveillait la forêt, essayant de s'assurer de la provenance du son. Rien.
« Continuons d'avancer. Où t'emmène-t-on, Lyana ?
- Au village, où je vis. C'est à travers les arbres. Le loup sait où aller. Ils le savent tous. »
Si sa voix n'avait pas été plaisante et douce, Lathril aurait trouvé l'implication omineuse. Mais elle suivit la traction régulière de la louve à travers les bois, entendant de temps à autre un bruissement dans les arbres, indiquant qu'elles étaient suivies. Assez vite, elles arrivèrent aux abords du village.
Alors qu'elles se dirigeaient vers le village, elle remarqua un cercle de maisonnettes de bois et de pierre autour d'un feu central, s'étendant plus loin en ce qu'elle supposa comme plus de cercles de structures. Elles marchèrent vers la première personne qu'elles virent au feu.
« Je crois que j'ai trouvé l'un de vos enfants, dit Lathril à l'ancienne qui attisait les flammes et se tourna comme dérangée par la soudaine intrusion.
- Pourquoi, oui, en effet, dit la femme en regardant de haut en bas Lyana avec un ton de désapprobation dans la voix. Lyana, où est Pistache ?
- On se promenait quand des draugar nous ont attaqués et l'un d'eux l'a emporté et a couru avec lui vers le nord, répondit-elle en prouvant son talent d'observation à Lathril.
- Et qu'as-tu fait ? s'enquit l'ancienne.
- J'ai essayé de les combattre, et puis elle est venue, répondit-elle avec ce ton accusatoire qu'ont tous les enfants et qui se rallie l'affection et l'approbation des adultes. Et elle m'a emmenée ici et maintenant je veux mon loup.
- Je peux le faire. J'ai été emmenée par le mien, » se trouva à dire Lathril, pensant à quel point son arrivée s'était faite à point nommé. C'était la quête pour laquelle on l'avait envoyée.
« Quel est le nom de ton loup ? demanda la fille avec plus d'accusation encore dans la voix.
- Elle ne me l'a pas encore dit, répondit Lathril avec honnêteté.
- Elle le fera. »
Après être revenue par la forêt, sans l'enfant, Lathril se trouva au bord d'une clairière avec sa louve, cachée entre ce qui était sans doute des buissons hantés. Ils avaient de fines branches à l'écorce blanche ou grise, et leurs feuilles étaient noirs et ne saisissaient aucune couleur, mais à proximité, Lathril put voir qu'elles avaient des veines blanches.
Au centre de la clairière, il y avait un piquet dans le sol avec une longue chaîne noire qui lui était attachée. Au bout de la chaîne il y avait un loup, un petit. Sous la lumière vacillante du feu et celle luisante de la lune, la louve était plus dorée que celle de Lathril.
Proche du feu, un homme bandait un coup de couteau dans son bras tandis qu'un autre sirotait une corne à voire. Ce n'était pas l'homme qu'elle avait frappé dans la tête plus tôt, alors elle admit qu'il avait été mis de côté dans la tente à la gauche de leur cachette. Si elle tendait l'oreille, elle pouvait entendre des ronflements.
Lathril s'installa sur le sol gelé en faisant attention à ne faire aucun bruit, et attendit. Elle savait que les hommes devaient dormir. Et, à un moment, ils le faisaient. Cela lui prit des heures de veille, mais le feu commença à faiblir, et les braises brillaient à côté de leurs corps endormis. Sans le harnais en main, Lathril glissa en avant. La louve rampa en avant, aussi, s'enroulant autour du louveteau en protection tandis que Lathril forçait avec succès le cadenas de sa chaîne. Avec un regard vers sa louve, elle commença à reculer lentement.
Tandis qu'ils commençaient leur fuite, une toux vint de la tente. Une respiration sifflante et une malédiction.
Ils se glacèrent tous.
Lathril dut se retourner pour se retrouver regardant maintenant l'homme qu'elle avait frappée du pied sortant de la tente, ses mains frottant sa tête. Elle se déplaça aussi lentement et agilement qu'elle le put, essayant de faire attention aux craquements, mais elle ne fut pas assez rapide. Une main s'élança, saisissant son coude droit avant qu'elle ne pût dégainer son épée.
Plus une mêlée qu'un combat, alors, pensa-t-elle. Son instinct prit le dessus. Genou dans le bide, épaule en avant, saut en arrière. Fermer tes yeux parce qu'ils sont inutiles, de toute façon. Sentir l'air alors qu'il attaque ton visage, puis saisir, tordre, lâcher. Le silence avec lequel le combat fut presque conduit montrait clairement qu'il avait été surpris. Le dernier souffle d'air qui sortit de lui, comme un oreiller mal rembourré, maintenant qu'il gisait dans la neige était son signal. Ouvrir les yeux et courir.
Pendant la course à travers la forêt, elle s'autorisa pour la première fois à avancer plus vite que le rythme réservé aux aveugles. Les arbres avaient l'air d'ennemis, empiétant sur son chemin étroit, et elle se désorienta rapidement. Où étaient les loups ? Où était le village ? Où étaient les ennemis qui assurément la poursuivaient ?
Lathril se retourna, agrippant les branches et jetant des regards déments d'un côté à l'autre, s'arrêtant finalement dans une panique assommante. Elle ne savait pas où elle était ni où elle pourrait aller.
Jusqu'à ce qu'elle réalise qu'elle était exactement là où elle le devait.
En face d'elle, un loup géant était recroquevillé au milieu de la clairière, et les deux loups avec lesquels elle s'était échappée s'inclinaient devant lui. Ses yeux brillaient de puissance.
Lathril savait reconnaître le pouvoir. Elle porta sa main à sa poitrine et s'inclina, les mains aussi éloignées que possible de ses armes.
Tu as sauvé un de mes enfants de ceux qui blesseraient la meute. Tu as accepté celui que je t'ai envoyé. Son nom est Lukya.
Lathril ne parla ni n'établit de contact visuel direct avec le loup en face d'elle.
« En effet, et j'accepte le cadeau qu'elle m'a donné par son aide, » dit-elle tandis que Lukya revenait vers elle pour s'installer à sa gauche.
Comme autre cadeau, les tiens pourront tous marcher en sécurité parmi mes terres et communiquer avec mes bêtes, qu'ils portent ou non ma bénédiction.
Lathril acquiesça de nouveau.
« Nous allons ramener Pistache à son humaine. »
Pistache, le petit loup, percuta dans la foulée sa maîtresse. La petite fille roula et tomba avec son loup au milieu de la ville. Ils agissaient comme des louveteaux, des flous joyeux se mêlant avec la foule qui les entourait.
La percée de présage s'ouvrit, et Lathril marcha à travers elle, avec son nouvel ami en sécurité à côté d'elle.