Rédemption - Magic the Gathering

Rédemption

Rédemption

Wizards nous a privés de Magic Story pour Theros par-delà la mort : pas de livre, pas d'histoire gratuite, rien. Mais j'ai décidé d'écrire un peu, parce que j'en avais envie. Les événements décrits ici ne sont pas canons : il s'agit d'une histoire personnelle, qui raconte une partie trop tue de l'histoire qui nous a été fournie.

  Chroniques guerrières / Theros par-delà la mort

Wizards nous a privés de Magic Story pour Theros par-delà la mort : pas de livre, pas d'histoire gratuite, rien. Mais j'ai décidé d'écrire un peu, parce que j'en avais envie. Les événements décrits ici ne sont pas canons : il s'agit d'une histoire personnelle, qui raconte une partie trop tue de l'histoire qui nous a été fournie.

  Chroniques guerrières / Theros par-delà la mort



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le , par Drark Onogard
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Wizards nous a privés de Magic Story pour Theros par-delà la mort : pas de livre, pas d'histoire gratuite, rien. Mais j'ai décidé d'écrire un peu, parce que j'en avais envie. Les événements décrits ici ne sont pas canons : il s'agit d'une histoire personnelle, qui raconte une partie trop tue de l'histoire qui nous a été fournie.

Rédemption



Ekthos se réveilla en sursaut. Ces cris. Encore.

Cela faisait trois nuits qu'il l'entendait, trois nuits qu'ils s'éveillait en sursaut, trois nuits qu'il entendait l'ombre. Il plongea plus profondément dans ses draps. Il ne servait à rien de l'écouter. L'ombre était perdue, elle finirait bien par partir. En attendant, il lui était impossible de se rendormir. La crainte que la créature ne fasse irruption était trop forte. Il tremblait à cette simple idée, bien qu'il sache que c'était idiot. L'ombre était perdue, elle ne faisait qu'errer aux alentours. Personne n'avait été attaqué. Peut-être parce que personne n'osait sortir. Mais Ekthos le savait, ce n'était pas une de ces horreurs indicibles qui semaient la terreur, au sud.

Des créatures difformes, échappées du Monde souterrain, terrorisaient Eirini depuis peu. C'étaient des hordes d'hommes aux membres démesurés, aux visages décharnés, si tant est qu'ils en aient un. Certains portaient leur chair comme un manteau trop grand, d'autres laissaient leurs os saillir en griffes dorsales. Sur leurs corps, les yeux semblaient placés au hasard, dans la main, sur l'épaule ou le torse.

Et le bruit.

Theira, la cousine d'Ekthos, avait fui Eirini. Elle lui avait décrit ces bruits. Ce n'étaient ni des cris, ni des gargouillis, ni même des murmures. C'était la voix de la mort. Le rire des feuilles dans le vent surplombé par le rugissement d'une eau bouillante et de celui qui y plonge la main. Ce vacarme à rendre fou, qui commençait à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, se poursuivait des heures, sans interruption, orchestre sorti de la tombe et de l'asile.

Les troupeaux étaient décimés. Ces amas de chair, placides, déambulaient parmi les moutons, dominant de leurs deux mètres trente de peau noire les bêtes de laine. Les moutons les suivaient comme un berger, et lorsque la faim prenait la bête gémissante, elle piochait dans le troupeau un haruspice sanglant que les moutons, égarés, lapaient longuement. L'agneau mangeait sa mère, la mère tuait l'agneau.





Les bergers tentèrent bien d'endiguer tout cela. Ils prirent des épées, et chaque homme se lança dans la battue pour éradiquer le mal. Initiative héroïque. Et stupide. Les créatures devinrent cruelles, vives et agressives. La chair de mouton ne leur suffisait plus, et après que les troupeaux furent décimés, ce fut au tour des hommes. Les rescapés de la lutte rentrèrent dans leurs maisons, cachèrent leurs enfants et leurs femmes, fermèrent les portes, les fenêtres, les serrures.

Le village était mort. Les abominations désormais couraient perpétuellement, l'odeur moisie de leur rire essoufflé persistant sur leur sillage. Le village avala la horde d'horreurs comme son poison. Elles grimpaient sur les masures, escaladaient les murailles, rentraient par les fenêtres, tuaient les habitants. Elles sentaient le sang, jusque sous les trappes. Les enfants furent trouvés et massacrés. Même la gueule gorgée de chairs, leur rire pestiféré ne se coupait pas. Eirini n'était plus que le gloussement mortifère des arracheurs de chair.



Mais les cris qu'Ekthos entendait et qui lui glaçaient le sang n'étaient pas ceux de ces créatures. Ce n'étaient pas des rires étouffés par un repas morbide. C'était une plainte, longue, une élégie, un dithyrambe à la douleur. C'était une gorge humaine qui les prononçait, et elle n'était obstruée par aucun festin. Il entendait ce cri terrifiant, dont toute la terreur ne tenait pas dans sa nature, mais dans ce qu'il exprimait.

Son cri disait les larmes de toutes les étoiles, une peine innombrable et nocturne. Puis le silence, à l'aube. Un silence plus lourd encore que ses hurlements gutturaux, parce qu'ils continuaient, silencieusement, insinueusement, dans le cœur d'Ekthos. Il entamait sa journée de travail, le cœur enchaîné à ses propres souvenirs, refoulant ses larmes.





Mais la plainte se tut prématurément. La nuit était encore longue, quand elle cessa de parvenir aux oreilles de l'architecte. « Enfin partie, » pensa-t-il avec un soulagement emprunt de tristesse. Il referma les yeux, et somnola un peu.

« Elspeth ! »

Ekthos entendit l'ombre.

« Elspeth ! »

Elle disait quelque chose.

« Elspeth ! »

C'était un nom.

« Elspeth ! »

Celui de la Championne du Soleil.

« Elspeth ! »

C'était Daxos de Mélétis.





Le pauvre homme, oracle de tous les dieux, qui avait été assassiné par l'être qu'il aimait le plus au monde : voilà qui était venu les tourmenter avec les seules armes que sa souffrance lui donnait.

« Elspeth ! »

Le cri se rapprochait, Ekthos en était sûr. Ou était-il devenu fou ? Et si l'ombre n'avait pas repris son chant ? Et s'il imaginait lui-même que l'ombre était Daxos, et qu'il hurlait le nom de sa bien-aimée ? Était-il seulement éveillé ? Non, ce n'était qu'un cauchemar, aucune ombre ne s'approchait de lui, aucune ombre.

« Elspeth ! »

La voix se faisait plus plaintive, comme un crissement d'épée contre un mur. Elle se faisait plus proche aussi, il en était sûr.

« Elspeth ! »

Son cœur cessa de battre, il retint sa respiration.

« Elspeth ! »

La voix était devant sa maison, mais ce n'était plus qu'un sanglot, et ce sanglot lui brûlait l'esprit comme une obsession ou le fer rouge.

« Elspeth ! »

La créature martelait à la porte, déchirait le bois de ses ongles, hurlait. Ekthos fit silence, et, caché sous ses draps comme un enfant, il cessa de respirer, de vivre, de penser. « Il n'existe pas, Ekthos, il n'existe pas. » se répétait-il jusqu'à ce que les mots perdent leur sens et deviennent une prière aux dieux.

« Il n'existe pas, Ekthos, il n'existe pas. »

Et les cris, les coups, les sanglots, les plaintes, les larmes, les chants, les peines, se turent à jamais.



L'ombre était chaude sur la peau de Daxos. Les larmes du Reparu ne coulaient pas à travers son masque, elles restaient collées à son âme endeuillée d'elle-même. Le monde le brûlait. L'herbe sous ses pieds était de braise, les arbres de longues flammes ondulant dans le vent, mais c'étaient les hommes qui le brûlaient le plus. Il fuyait leur compagnie car il savait la peur qu'il leur inspirerait, et qu'il savait qu'il ne la trouverait pas parmi eux.

Il la cherchait car il n'était pas capable d'accepter que la chercher était vain. Il errait sur Theros car il ne savait pas qu'elle était morte, car il ne voulait pas le savoir. La nuit, il hurlait son nom en espérant que les étoiles transmettraient son message à travers le monde. La nuit le brûlait. Il aurait voulu disparaître. Mourir à nouveau. Se plonger dans les bras du néant, retrouver sa mère, celle qu'il connut avant de naître, avant de pouvoir souffrir. Oublier ses larmes, oublier ses peines, oublier Elspeth, oublier qui il est, tout oublier, ne plus exister. Il voulait cesser d'être.





Seul le soleil calmait sa brûlure dans le monde. Le jour le calmait, il taisait un peu ses suppliques jusqu'à ce qu'il le quitte. Quand le soleil s'approcha de lui, un soupir lui échappa, qu'il sentit s'élever jusqu'aux cieux. Le soleil s'approcha, il ne distinguait pas sa silhouette, mais il le sentait plus proche, il entendait sa voix qui l'appelait, alors il se leva, tituba jusqu'à lui.

« Daxos. Enfant de Mélétis. Mort par amour, ressuscité par lui. Oracle de celui qui a été couronné de la couronne blanche des cieux et du soleil. Je t'appelle à moi. Tu n'es plus qu'un sanglot, mon fils. Tu es liquide, tu coules sur cette terre comme une larme. Tu es une poussière dans l'œil du monde. Tu n'es plus rien. Tout juste la mauvaise conscience de ceux qui t'ont connu. »





Tu dois redevenir un héros, Daxos. Tu n'es pas né pour être une ombre qui empêche les bergers de dormir, qui claudique sur les chemins en faisant peur aux enfants, qui hurle et frappe aux portes. Où sont tes armes, Daxos, ta grandeur, ta gloire ? Les as-tu emportés dans la tombe ? Relève-toi. Je suis la main qui se tend et la main qui relève. »

« Celui qui me relèvera aura ma reconnaissance comme cadeau, mais les dieux n'ont que faire de la dévotion d'un mortel et toute faveur amène une chaîne, telle est la loi de Nyx. Quel sera mon supplice pour qu'enfin je cesse d'être une plaie sur la joue du monde et que le monde cesse d'être une plaie sur ma joue ? »

« Quand tu auras ma force, et que ta mort sera un bouclier à ton bras, tu reviendras sur les marches des temples de ta jeunesse, et tu y briseras tous les vases, toutes les idoles et la mémoire des anciens dieux. Nyléa et Ephara, Kruphix, Mogis, et Thassa, Iroas et Athreos, Pharika et Keranos, Karametra et Phénax, Purphoros et Erebos, que ces noms ne soient plus jamais prononcés en Mélétis !

Fais de moi le seul dieu, je ferai de toi mon champion. »




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Proposé par Dark Mogwaï le 19/06/2012

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